Un immigrant perd son permis de travail en raison d’une erreur administrative


Employé d’un carrossier au Québec, un Marocain d’origine, dont le permis de travail n’a pas été renouvelé en raison d’une erreur administrative, se bat depuis plus de six mois pour pouvoir retourner au travail. Son employeur, le Groupe Saillant, déplore le parcours du combattant dans lequel il s’est engagé malgré lui pour pouvoir faire retravailler ce carrossier dont il a cruellement besoin.

« C’est vraiment un drame humain qui se produit, en pleine pénurie de main-d’œuvre aussi ! déclare Mélissa Dumont, directrice des communications et des ressources humaines du Groupe Saillant. On nous vend le recrutement international comme une solution à la pénurie de main-d’œuvre, mais j’ai un employé qui travaillait pour nous et que nous ne pouvons même plus employer. »

Avec quatre autres compatriotes recrutés pour leurs compétences lors d’une mission québécoise au Maroc, Mohcine El Kandouri a commencé à travailler pour le Groupe Saillant pendant la pandémie. Quelques mois avant l’expiration des permis de travail de ces employés, l’entreprise québécoise a confié à une firme de consultants en immigration, embauchée pour le recrutement et le traitement des demandes, le soin de renouveler les permis. Ils ont tous été renouvelés par Immigration Canada, sauf celui de M. El Kandouri, qui n’a appris la mauvaise nouvelle que très tard, en septembre 2022. Son dossier venait d’être définitivement clos un mois plus tôt en raison d’un document manquant.

C’est vraiment un drame humain qui se passe, en pleine pénurie de main-d’œuvre aussi ! On nous vend le recrutement international comme une solution à la pénurie de main-d’œuvre, mais j’ai un employé qui travaillait pour nous et que nous ne pouvons même plus employer.

« Nous avons demandé des renouvellements de licence pour tous nos travailleurs et avons fait le suivi nécessaire pour nous assurer que notre employé était légal et pouvait travailler. Nous avons été très surpris d’apprendre que son permis avait été refusé, s’étonne encore Mélissa Dumont. Ayant su cela plus tôt, nous aurions pu faire les choses différemment. »

« Je suis venu travailler, pas pour rester inactif », a déclaré Mohcine El Kandouri. Ils sont venus me chercher car il manque beaucoup d’employés dans mon domaine. Maintenant plus rien ne bouge. C’est comme si ma vie s’était arrêtée. »

Un document manquant

Selon nos informations, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) avait exigé en avril 2022 qu’on lui fournisse le certificat d’acceptation du Québec de M. El Kandouri, document obligatoire pour délivrer un permis de travail. Le principal concerné n’a jamais été informé de l’absence de ce document puisque son dossier était entre les mains de la firme de conseil ImmigrEmploi, à qui la demande avait été faite. « J’ai été surpris et choqué. Je n’en savais rien », a déclaré l’ouvrier marocain.

Je suis venu travailler, pas pour rester les bras croisés. Ils sont venus me chercher car il manque beaucoup d’employés dans mon domaine. Maintenant plus rien ne bouge. C’est comme si ma vie s’était arrêtée.

Le Groupe Saillant dit avoir eu beaucoup de mal à comprendre ce qui s’était passé. « On a fini par savoir que la consultante avait entre-temps quitté le cabinet, mais le dossier devait encore être sous sa responsabilité, estime M.moi Dumont. C’est une situation vraiment désagréable qui touche beaucoup de gens. »

Demandé par Le devoir, le président de la firme ImmigrEmploi, Luc Gauvin, explique cette situation malheureuse par un « problème informatique ». La consultante en charge du dossier de M. El Kandouri n’aurait jamais reçu de message d’IRCC l’informant qu’il manquait des documents au dossier. « Elle comptait sur cet e-mail et il n’est jamais revenu », a-t-il déclaré. Quand elle est allée voir [en septembre, dans le portail d’IRCC], elle a vu la correspondance demandant le certificat d’acceptation, mais il était trop tard. Selon lui, il y avait « un autre bug » du site gouvernemental, qui compliquait les échanges.

Une attente difficile

Le Groupe Saillant dit avoir fait tout son possible pour aider son travailleur à retrouver son statut d’intérimaire. « Dès que nous l’avons su, nous avons contacté un cabinet d’avocats avec lequel notre corporation de marchands fait affaire et un avocat a travaillé fort pour nous aider à régler sa situation », explique Mélissa Dumont.

À la mi-novembre, une demande de rétablissement de statut a été déposée, ainsi qu’une demande de permis de séjour temporaire, accompagné d’un permis de travail, pour éviter que M. El Kandouri ne soit interdit de territoire. L’entreprise a même frappé à la porte des bureaux de circonscription des députés fédéraux Joël Lightbound et Jean-Yves Duclos pour tenter de faire avancer le dossier.

Mmoi Dumont se dit désolée pour ce travailleur d’origine marocaine dont la vie est suspendue depuis plus de six mois. « Au-delà de la perte pour notre entreprise, on parle ici d’un pauvre travailleur qui peine à joindre les deux bouts. Nous sommes une entreprise humaine et nous faisons ce que nous pouvons pour aider, mais nous sentons que nos mains sont liées. Nous ne pouvons pas faire grand-chose pour lui en ce moment. »

Depuis l’automne dernier, Mohcine El Kandouri vit dans un petit studio au Québec sans aucun revenu. Il reçoit l’aide d’une banque alimentaire pour se nourrir et est maintenant au bout de ses économies qui lui permettent de payer son loyer. « Je vais bientôt vivre chez un ami », déclare l’ouvrier marocain. Il dit qu’il appelle IRCC tous les jours, ce qui signifie faire la queue pendant au moins une heure. « Je demande ma demande. On me dit que c’est en cours de traitement. »

Que l’erreur ait été commise par la négligence de la firme de consultants ou par IRCC, Mélissa Dumont déplore la grande « rigidité » du système d’immigration. « Je comprends qu’ils ne peuvent pas commencer à traiter chaque dossier individuellement, mais n’y a-t-il pas quelqu’un qui pourrait prendre 15 minutes pour régler ce dossier ? elle soupire.

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