[Opinion] Saint-Henri–Sainte-Anne, un amalgame diversifié de quartiers montréalais


Contrairement aux circonscriptions voisines constituées d’anciennes villes de banlieue, Saint-Henri–Sainte-Anne est un amalgame de quartiers montréalais dont les particularités reflètent leurs racines historiques et des profils sociologiques contrastés.

Tendances temporelles

En comparant les courbes du vote partisan lors des récentes élections de Verdun et de Saint-Henri–Sainte-Anne (voir les deux tableaux), on constate que ces deux circonscriptions sont traversées par des mouvements similaires.

Saint-Henri–Sainte-Anne est une circonscription libérale depuis sa création en 1992. Depuis 2007, le Parti libéral du Québec (PLQ) a généralement recueilli 11 000 votes ou plus par élection générale. En 2014, lorsque les libéraux de Philippe Couillard ont repris le pouvoir, le vote libéral a atteint un sommet avec 19 795 votes. La députée Marguerite Blais (2007-2015) a ensuite succédé à Dominique Anglade.


Dans le contexte de la prise de pouvoir par la Coalition avenir Québec (CAQ) en 2018, la circonscription demeure un fief libéral. En 2022, dans un contexte peu favorable au PLQ, Dominique Anglade, devenue chef du parti, a su fidéliser 11 728 partisans.

Depuis 2007, le Parti québécois (PQ) a attiré en moyenne de 8 000 à 9 000 électeurs. Mais en 2012, lors de l’arrivée au pouvoir du parti de Pauline Marois, la candidate Sophie Stanké obtient un pic de 11 587 voix. Puis, en 2014, le parti a subi des pertes, qui seront encore plus importantes en 2018. Les chiffres suggèrent que certains membres du PQ se seraient temporairement rangés du côté du PLQ en 2014, alors qu’entre 2018 et 2022, ils se seraient majoritairement tournés vers Québec solidaire ( QS) ou aurait choisi de rester à la maison.


En 2012, la CAQ de François Legault a obtenu 5 573 voix, soit un peu plus que ce que l’Action démocratique du Québec (ADQ) a obtenu en 2007. En 2018, avec l’arrivée au pouvoir de la CAQ, le vote local de la CAQ a atteint son apogée avec 5 809 voix. En 2022, dans un contexte de victoire sans équivoque, et contrairement à ce qui se passe partout au Québec, la CAQ perd quelques plumes dans Saint-Henri–Sainte-Anne, comme d’autres circonscriptions de l’ouest de l’île de Montréal.

En 2012, QS sollicitera 4084 votes, et en obtiendra 8992 dix ans plus tard. En 2018, la fête est arrivée deuxième comme à Verdun. En 2022, les électorats libéraux et caquistes ayant atteint des sommets, QS a visiblement recruté d’anciens péquistes. Si le même transfert est incertain ou partiel pour 2018, la cartographie du vote va dans ce sens.

Dynamique spatiale

L’analyse basée sur la cartographie des résultats par section de vote, comme Le devoir a publié (en 2018 avec « Vos voisins votent-ils comme vous ? » et, en 2022, avec « Pour qui ont voté vos voisins ? »), met en lumière des dynamiques locales comme celles que l’on retrouve à Saint-Henri–Sainte-Anne.

En 2018, sur fond rouge, une série de pièces de puzzle orange, flanquées de quelques pièces bleues, sont apparues dans certains secteurs. Ces zones chevauchent des zones à majorité péquiste après les élections de 2008 ou 2012. En 2020, le rouge domine toujours, mais la dynamique est amenée à évoluer et à varier selon les quartiers.

En 2016, dans la partie est, 51 % de la population parlait français à la maison, un taux qui est passé à 58 % dans la partie ouest. Les minorités ethniques et linguistiques sont plus importantes dans la Petite-Bourgogne et Émard.

En 2015, dans l’Est, sous l’effet de la gentrification qui s’étend le long du canal de Lachine avec sa concentration de propriétaires, le revenu moyen des ménages est de 72 627 $. À l’ouest, il est de 57 345 $, ce qui est inférieur à la moyenne montréalaise (69 047 $).

À l’est, entre les élections de 2018 et de 2022, Pointe-Saint-Charles a peu évolué, le vote libéral oscillant entre 35 % et 50 % selon les sections de vote. En 2018, QS a fait une incursion réussie à Saint-Gabriel après des victoires serrées. Dans Griffintown, malgré quelques pertes depuis 2018, le PLQ demeure solide, conservant 40 % à 50 % des voix. C’est dans la Petite-Bourgogne que les libéraux obtiennent leurs plus belles victoires, constituées de majorités absolues dépassant les 60 % dans certaines sections.

La dynamique est plus complexe dans la partie ouest. Dans Émard, le PLQ maintient le plus souvent son avance, qui oscille entre 35 % et 45 % des suffrages. À Côte-Saint-Paul, les combats se font par trois. Le vote de la CAQ s’est toutefois affaibli au dernier scrutin, laissant QS l’emporter dans la majeure partie du quartier, malgré des taux serrés de 30 % à 35 %. À Saint-Henri, en 2018, les victoires solidaires sont notables, mais en 2022, la chute de l’appui local de la CAQ entraîne plusieurs échanges de sections de vote entre libéraux et solidaires.

Mouvements)

Les dynamiques politiques qui différencient les parties est et ouest de la circonscription ne sont pas étrangères aux réalités linguistiques et socioéconomiques.

En 2022, lorsque QS remporte Verdun, l’effectif libéral est maintenu dans Saint-Henri–Sainte-Anne (voir les deux tableaux). Toutefois, puisque dans la présente élection partielle, le PLQ ne présente pas d’aspirant premier ministre, QS est en mesure d’améliorer ses points de pourcentage compte tenu du faible taux de participation attendu. Les secteurs à surveiller viennent d’être identifiés.

Les deux circonscriptions citées connaissent une évolution politique synchrone, ce qui n’est pas si surprenant si l’on considère qu’il s’agit de territoires hybrides. Ils participent à l’univers culturellement métissé du sud-ouest de l’île, d’origine libérale, tout en se rapprochant progressivement du profil sociologique de la ville-centre, majoritairement solidaire. Les mouvements sont découverts en reliant courbes temporelles et phénomènes spatiaux, la cartographie mettant en lumière des réalités locales qui autrement échappent aux radars.

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