Montréal doit facturer tout son stationnement sur rue, selon la CRE

La Ville de Montréal doit cesser de « subventionner » le stationnement sur rue, affirme le Conseil régional de l’environnement (CRE) de Montréal. Dans un « livre blanc » dévoilé lundi, l’organisme soutient que la Ville devrait tarifer toutes les places de stationnement sur le domaine public, non seulement pour des raisons environnementales, mais aussi par mesure d’équité.
Près du tiers des ménages de l’île de Montréal ne possèdent pas de voiture et 31 % des véhicules sont généralement garés sur des terrains privés, aux frais du propriétaire. Or, tous les contribuables, par leurs taxes foncières ou leur loyer, assument le coût des places de stationnement sur rue, qu’ils les utilisent ou non. « Il n’y a aucune raison pour que la municipalité subventionne la voiture de certains alors qu’elle manque d’argent pour les services de base à la population », résume Blaise Rémillard, responsable des transports et de l’urbanisme au CRE de Montréal.
À partir de plusieurs données, dont la valeur des terrains à Montréal et les coûts de construction, la CRE de Montréal estime le coût annuel moyen d’une place de stationnement sur rue sur l’île à 1 275 $. Dans plusieurs secteurs de l’agglomération montréalaise, les résidents doivent se procurer une vignette de stationnement s’ils veulent pouvoir trouver une place plus facilement, mais le coût de ces vignettes est bien inférieur au coût réel des places de stationnement.
À Montréal, c’est dans Le Plateau-Mont-Royal que la première vignette est la plus chère, jusqu’à 269 $, suivi de près par Ville-Marie. Mais ils sont encore plus chers dans les municipalités de Côte-Saint-Luc et de Montréal-Ouest (jusqu’à 300 $). Les coûts augmentent à nouveau pour la deuxième vignette. Par contre, dans certains quartiers comme Saint-Léonard, LaSalle ou Pierrefonds, les vignettes sont gratuites.
« Pour nous, il y a là une iniquité, d’autant plus que dans le contexte de crise climatique, on veut réduire l’usage de l’automobile. Nous avons besoin de beaucoup d’espace pour verdir la ville, se préparer aux canicules extrêmes et offrir des milieux de vie plus sécuritaires et de meilleure qualité », a déclaré M. Rémillard.
sujet de discorde
Le livre blanc publié lundi par le CRE de Montréal a été élaboré dans le cadre des travaux menant à l’adoption du nouveau Plan d’urbanisme et de mobilité de Montréal. L’organisation formule 23 propositions pour rendre plus cohérente la gestion du stationnement. L’une des recommandations suggère de tarifer toutes les places de stationnement sur rue selon le principe de l’utilisateur-payeur. Cette tarification pourrait être mise en place graduellement d’ici 2035, pour coïncider avec la fin de la vente des véhicules à essence au Québec. Les recettes ainsi perçues pourraient être réaffectées à des services bénéficiant à tous les citoyens, suggère la CRE, qui propose également de supprimer les places de stationnement sous-utilisées.
À Montréal, les 475 000 places de stationnement sur rue occupent 27 % de la voirie, soit une superficie de 7 km2, souligne le CRE de Montréal. C’est 12 fois plus d’espace consacré au stationnement qu’aux voies réservées au transport en commun et aux vélos. De son côté, le stationnement hors voirie s’étend sur l’équivalent de 15,3 km2 avec au moins 470 000 places.
Pour atteindre son objectif de neutralité carbone en 2050 et réduire la dépendance à la voiture, il vaudrait mieux que la Ville vise une tarification plus juste et la requalification d’une partie des places de stationnement pour permettre des aménagements pour les transports actifs et collectifs, voire pour le logement. , estime la CRE de Montréal.
Cependant, certains quartiers sont défavorisés et moins bien desservis en infrastructures de transport actif et collectif. Dans ce contexte, la CRE de Montréal propose de mettre en place un programme de soutien aux ménages à faible revenu sous forme de compensation financière directe.
La tarification doit également tenir compte des caractéristiques du véhicule, telles que l’espace occupé, les émissions et le poids. Ces indicateurs pourraient être associés à des plaques d’immatriculation.
La CRE a également quelques recommandations pour le stationnement hors voirie, comme la suppression des ratios minimaux de stationnement dans les projets immobiliers ou des mesures favorisant la mutualisation des parkings.
Obstacles
Bien que l’administration Plante accueille avec ouverture les propositions de la CRE de Montréal, elle n’est pas prête à appliquer la tarification à toutes les places de stationnement du territoire. « Nous n’en sommes pas là à court terme, précise Sophie Mauzerolle, responsable des transports et de la mobilité au comité exécutif. « Pour nous, la tarification du stationnement est un des leviers de la mobilité durable, mais il est difficile de demander aux gens de faire un report modal, d’abandonner la conduite en solo et d’imposer un fardeau financier aux Montréalais s’ils n’ont pas d’alternative. »
Montréal est plus occupée à offrir des services de transport actif et collectif et à promouvoir l’autopartage, a indiqué l’élu. L’Agence de la mobilité durable, qui a pour mandat de gérer la problématique du stationnement à Montréal, travaille sur plusieurs dossiers, dont la modulation du prix des parcomètres sur les artères commerciales, la collecte de données plus précises sur le stationnement et la lecture automatisée des plaques. Plusieurs arrondissements, dont Rosemont–La Petite-Patrie et Ville-Marie, ont aussi mis en place une modulation des prix des vignettes selon le type de véhicule, rappelle-t-elle. « Mais il y a des pistes de réflexion intéressantes [dans les recommandations du CRE] », reconnaît M.moi Mauzerolle.
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