Le Mali et la Côte d’Ivoire rapatrient 300 ressortissants face aux attaques racistes en Tunisie

Environ 300 Ivoiriens et Maliens ont commencé à être rapatriés le 4 mars de Tunisie face aux attaques et à l’hostilité à leur encontre après un discours violent du président Kais Saied contre les migrants irréguliers subsahariens.
Le 21 février, Kais Saied affirmait que la présence en Tunisie d’immigrants illégaux en provenance des pays d’Afrique subsaharienne était une source de « violences et délits » et est tombé sous un « entreprise criminelle » visant à « modifier la composition démographique » du pays. Ce discours, condamné par des ONG comme « raciste et haineux », a provoqué un tollé dans le pays. A Tunis, des centaines de manifestants sont descendus dans la rue le 25 février pour scander « non au racisme ». Malheureusement, le discours présidentiel a eu pour effet de déclencher une vague d’attaques contre des subsahariens qui se sont précipités par dizaines dans leurs ambassades pour être rapatriés.
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Après un premier vol ramenant au pays une cinquantaine de Guinéens évoquant « un déferlement de haine » le 1er mars, la Côte d’Ivoire et le Mali devaient rapatrier 300 de leurs ressortissants le 4 mars. Le Mali a affrété un avion pour rapatrier 150 personnes sur ordre du chef de la junte Assimi Goita. A peu près autant d’Ivoiriens ont dû être rapatriés par avion. Parmi eux se trouvent 30 étudiants ivoiriens en situation régulière, « certains ont été victimes d’actes racistes, chassés par leurs propriétaires ou agressés physiquement », a déclaré à l’Agence France-Presse Michaël Elie Bio Vamet, président de l’Association des étudiants ivoiriens. Selon l’ambassadeur ivoirien à Tunis, Ibrahim Sy Savané, « le nombre de candidats au retour atteint 1.100 », un chiffre non négligeable pour la communauté ivoirienne qui, avec au moins 7 000 personnes, est la plus nombreuse d’Afrique subsaharienne en Tunisie, grâce à une dispense de visa d’entrée.
Des témoins disent être pourchassés par des milices
Bon nombre des 21 000 ressortissants d’Afrique subsaharienne officiellement enregistrés en Tunisie, pour la plupart en situation irrégulière, ont perdu du jour au lendemain leur emploi – généralement informel – et leur logement à la suite de la campagne contre les clandestins. Plusieurs dizaines ont été interpellés lors de contrôles de police, et certains sont toujours en détention. D’autres ont témoigné devant des ONG de l’existence de « milices » qui les chassent, les battent et les volent. Cette situation a provoqué l’afflux de dizaines de personnes vers leurs ambassades, notamment de Côte d’Ivoire et du Mali, qui ont décidé d’en accueillir jusqu’à une centaine en urgence.
D’autres migrants, encore plus vulnérables car venant de pays sans ambassade à Tunis, ont rejoint un campement improvisé devant le siège de l’Office international des migrations (OIM), où ils dorment dans le froid et l’insalubrité. Pour accélérer les rapatriements, la Tunisie aurait renoncé à réclamer aux personnes en situation irrégulière des amendes (80 dinars, 25 € par mois de séjour irrégulier) qui, pour certaines, dépassaient 1 000 €, selon un diplomate malien.
Parmi les candidats au retour, on compte des dizaines d’étudiants, parfois issus de familles aisées, inscrits dans des universités et des centres de formation créés dans le cadre de la coopération entre la Tunisie et leurs pays. Effrayés, beaucoup sont rentrés par leurs propres moyens ces derniers jours, selon l’un de leurs représentants.
L’Association des étudiants étrangers AESAT a documenté l’attaque du 26 février contre « quatre étudiants ivoiriens quittant leur résidence universitaire » et D’« une étudiante gabonaise devant chez elle ». Le lendemain du discours de M. Saied, elle a instruit des étudiants subsahariens « rester à la maison »et non plus « aller en classe », au moins jusqu’au 6 mars.
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Fr1