[Critique] « Lohengrin » de François Girard, une catastrophe au cinéma

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C’était l’émission Metropolitan Live en HD la plus attendue de l’année : l’énorme Lohengrin de Wagner, associant François Girard à la mise en scène et Yannick Nézet-Séguin à la direction musicale, a été massacré au cinéma par des scories techniques indignes.
Rien n’aura été épargné aux spectateurs québécois, et probablement canadiens, qui ont enduré stoïquement l’insupportable dans les cinémas Cineplex samedi : les interruptions de son (décrocheurs) très régulier, disparition des sous-titres à la fin du IIe acte, le tout culminant au pire dans l’acte III avec, en plus, décrocheursl’image se fige.
On peut incriminer le signal envoyé par le Met, ou une question de « transits solaires » qui peuvent affecter le signal du satellite. A la sortie du cinéma, un membre du personnel nous a cependant avoué que le système d’accueil avait été remanié dans la semaine et avait des problèmes depuis. Le fait est que cela semble être un problème canadien, les fans aux États-Unis ne signalant aucun incident de ce type et les Européens n’ayant eu qu’un problème éphémère et ponctuel avec les sous-titres. Au moment où ces lignes ont été écrites, Le devoir n’avait toujours pas reçu de réponse à sa demande d’explication de la part du service des communications de Cineplex.
Lisibilité wagnérienne
Cela étant dit, le Lohengrin vu par François Girard est digne de ses autres spectacles wagnériens et doté d’une très grande cohérence par rapport à Parsifal (on rappellera que, même si l’opéra a été composé antérieurement, le personnage de Lohengrin est le fils de Parsifal). C’est dans un univers indéterminé (temps et espace), intégré dans un cosmos, mais visiblement ravagé, que s’affrontent les forces du bien et du mal.
La base du succès de ce Lohengrin est de réussir à intégrer le chœur omniprésent dans la symbolique narrative. Les forces opposées sont rouges et blanches. L’enjeu est le monde (sombre, plus ou moins baigné de lumière), avec le message écologique de Parsifal. A travers la récurrence de la couleur verte, Girard et ses partenaires dans la conception du spectacle rappellent qu’au-delà des questions morales, c’est l’avenir de la Terre qui est en jeu. Et on voit dès l’ouverture qu’une planète aussi, elle peut exploser si « rouge » l’emporte.
Il est très intéressant de voir comment les grands réalisateurs québécois (Lepage, Girard) cherchent à rendre Wagner avant tout lisible, avec des moyens modernes et de fines astuces techniques (vidéo pour Lepage, costumes sophistiqués conçus par Tim Yip ici). Et même si François Girard évite la charrette tirée par un cygne, l’apparition de Lohengrin est saisissante avec une grande aile qui se dessine peu à peu dans le ciel.
L’espoir de renouveau s’incarne dans ce fait d’être vêtu d’une chemise blanche, alors que chacun porte de lourdes capes. Mais c’est le manque de foi qui le fera quitter ces lieux. Girard avait « déchristianisé » Parsifal. Nous sortons de Lohengrin encore plus troublé. En quoi avons-nous encore foi et qu’est-ce qui nous guide, pour aller où ?
Grande planche
Yannick Nézet-Séguin est très à l’aise dans ce Wagner très lyrique (dans le sens du chant, des phrases, du souffle) et basé, lui aussi, sur une matière chorale qu’il aime pétrir (excellent chœur). La paire vilaine est impeccablement interprétée par Evgeny Nikitin et Christine Goerke, qui semblent s’amuser en jouant Ortrud, une méchante sorcière aux doigts crochus. Günther Groissböck, le roi, a la bonne échelle, mais ses aigus sont serrés à Ieuh agir, sans doute parce qu’il est midi et qu’une voix n’est pas à son maximum à ce moment-là.
Que deviendront les représentations au cinéma après un rendez-vous crucial ainsi sabordé, alors même que le Met cherche à reconquérir sa clientèle perdue pendant la pandémie ?
Tamara Wilson est une excellente Elsa avec, pour ce qu’il paraît au cinéma, l’ampleur du rôle. Elle passe très bien de la candeur au doute. A Lohengrin, Piotr Beczala n’est pas le grand Heldenténor comme nous l’avons connu, mais aborde le rôle avec une aisance élégante et une sorte de bienveillance détachée.
Que deviendront les représentations au cinéma après un rendez-vous crucial ainsi sabordé, alors même que le Met cherche à reconquérir sa clientèle perdue pendant la pandémie tout en protégeant bec et ongles, diront certains de manière excessive, son partenaire diffuseur en limitant délibérément le développement de son Live at Home initiative?
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